Le financement participatif réglementé
Ord. 2014-559 du 30 mai 2014 (JO du 31 mai p. 9075)
Une ordonnance entrant en vigueur le 1er octobre 2014 encadre le financement participatif. Elle prévoit notamment la possibilité pour les SAS d’offrir leurs actions au public par l’intermédiaire d’une plate-forme de financement participatif.
- Le financement participatif (ou « crowdfunding ») désigne le financement de projets innovants, artistiques, humanitaires ou encore de création d’entreprises grâce à la collecte de fonds auprès d’un grand nombre de personnes par l’intermédiaire de plates-formes sur internet. Il peut prendre la forme de prêts, de dons ou d’investissement en capital dans les entreprises.
Dans ce mode de financement, développé récemment en France, la part apportée par chaque internaute reste toujours minime. C’est pourquoi il faut réunir un grand nombre d’investisseurs pour boucler le plan de financement, nombre que seul le recours à internet permet d’atteindre.
La loi 2014-1 du 2 janvier 2014 a habilité le Gouvernement à créer par ordonnance un cadre juridique adapté à ce nouveau mode de financement afin d’en assurer le développement dans des conditions juridiques sécurisées et offrir une protection des investisseurs ou des prêteurs.
- L’ordonnance a été publiée (Ord. 2014-559 du 30 mai 2014 : JO du 31 mai p. 9075). Elle entrera en vigueur le 1er octobre 2014 (art. 37, al. 1).
Deux types de plate-forme de financement participatif sont réglementées :
- celles qui proposent des titres aux investisseurs sur un site internet ; elles exerceront leur activité en tant que conseillers en investissements participatifs, statut créé par l’ordonnance – que nous ne présenterons pas ci-après – ou en tant que prestataires de services d’investissement ;
- celles qui proposent à des particuliers, sur un site internet, le financement de projets sous forme de prêts, qu’ils soient rémunérés ou non ; elles exerceront leur activité en tant qu’intermédiaires en financement participatif, statut également créé par l’ordonnance, que nous n’exposerons pas non plus.
I. Diffusion de titres dans le public par internet
Offre de titres par l’intermédiaire d’une plate-forme
- Le fait pour un prestataire de services d’investissement ou un conseiller en investissements participatifs de proposer des titres financiers non cotés (non admis aux négociations sur un marché réglementé ou un système multilatéral de négociation) au moyen d’un site internet dans la limite d’un certain montant ne sera pas considéré comme une offre de titres au public au sens de l’article L 411-1 du Code monétaire et financier (C. mon. fin. art. L 411-2, I bis nouveau ; Ord. art. 11) et ne sera donc pas soumis à l’obligation d’établir un prospectus.
Les caractéristiques du site seront déterminées par le règlement général de l’Autorité des marchés financiers (AMF) et le plafond en deçà duquel l’opération ne sera pas qualifiée d’offre au public sera fixé par décret. Il sera calculé sur une période de douze mois dans des conditions fixées par le règlement général de l’AMF (art. L 411-2, I bis-3°).
- La société dont les titres seront proposés au public dans les conditions prévues ci-dessus ne pourra pas se prévaloir des dispositions de l’article L 232-25 du Code de commerce autorisant les micro-entreprises déposant leurs comptes annuels au greffe du tribunal à ne pas rendre ceux-ci publics (C. mon. fin. art. L 411-2, I bis-dernier al.).
Cas particulier de l’offre de titres émis par une société par actions simplifiée (SAS)
- Les titres d’une SAS pourront être offerts par l’intermédiaire d’une plate-forme dans les conditions prévues ci-dessus (C. com. art. L 227-2 modifié ; Ord. art. 13). La SAS devra appliquer certaines règles prévues pour la consultation des actionnaires de société anonyme (SA) en assemblée (art. L 227-2-1 nouveau, I ; Ord. art. 14) :
- les modifications des statuts ne pourront être décidées qu’en assemblée générale extraordinaire dans les mêmes conditions de quorum et de majorité que pour les SA et les autres décisions collectives relèveront de la compétence de l’assemblée ordinaire dans les mêmes conditions ;
- l’assemblée ne pourra délibérer que sur les questions inscrites à l’ordre du jour ; toutefois, comme dans les SA, elle pourra en toutes circonstances révoquer et remplacer les administrateurs et les membres du conseil de surveillance si la SAS comporte ce type de dirigeants ;
- le droit de vote attaché aux actions devra être le même que dans les SA (droit proportionnel à la quotité de capital, sauf institution dans les statuts d’un droit de vote double ou d’un plafond limitant le nombre de voix pour chaque associé).
Bien que le texte ne le précise pas, ces règles s’appliqueront nonobstant toute clause contraire des statuts à compter du jour où les titres de la société seront proposés sur internet.
- La convocation des associés devra être faite dans des conditions de forme et de délai fixées par décret. Toute assemblée irrégulièrement convoquée pourra être annulée. Toutefois, l’action en nullité ne sera pas recevable lorsque tous les associés seront présents ou représentés (C. com. art. L 227-2-1, I-4°).
Si la société proposant les titres est une holding ayant pour objet de détenir et de gérer des participations dans une autre société, les règles de l’article L 227-2-1, I ci-dessus seront également applicables à cette société (art. L 227-2-1, II).
II. Financement participatif sous forme de prêts
- Pour permettre aux plates-formes de proposer des prêts rémunérés, il est ajouté une dérogation au monopole bancaire. Les personnes physiques agissant à des fins non professionnelles ou commerciales pourront consentir un prêt rémunéré à taux fixe à d’autres personnes physiques ou morales pour le financement d’un projet déterminé (C. mon. fin. art. L 511-6, 7 nouveau ; Ord. art. 15). Les caractéristiques de ces prêts et notamment leur durée maximale seront fixées par décret.